ET LA FEMME CRÉA HOLLYWOOD

  • France
  • 2016
  • 52 min
  • VOST
  • Tout Public
  • Synopsis
Le premier film parlant a été réalisé par Alice Guy, le premier en couleurs a été produit par Lois Weber qui a réalisé plus de 300 films en dix ans, Frances Marion était la scénariste de la star Mary Pickford, et gagna deux Oscars, Dorothy Arzner fut la réalisatrice la plus puissante d’Hollywood, leur point commun ? Ce sont toutes des femmes et elles ont toutes été oubliées.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, il aura fallu attendre 2010 et Kathryn Bigelow pour qu’une femme soit récompensée aux Oscars dans la catégorie Meilleure Réalisation ! Si elles sont sous-représentées, les femmes ont pourtant toujours fait partie de l’Histoire du 7e Art. C’est cette partie de l’histoire souvent passée sous silence que le documentaire propose de raconter.

  • Notre avis
La naissance du cinéma se conjugue souvent au masculin : Auguste et Louis Lumière, Georges Méliès, Thomas Edison, Charlie Chaplin. Ce que l’on sait moins – l’info reste aujourd’hui encore très confidentielle – c’est qu’avant 1925, la moitié des films étaient réalisés par des femmes. L’histoire, écrite par les hommes, a effacé celles qui bâtirent l’usine à rêves hollywoodienne au début du XXe siècle. Pourquoi cette amnésie collective, et comment la conjurer par de nouveaux récits ?

C’est le trajet, à la fois historique et militant, qu’emprunte ce documentaire pointu de Clara et Julia Kuperberg, deux réalisatrices françaises passionnées par l’âge d’or des studios. Elles y convoquent, à travers des images d’archives au grain nostalgique, toute une avant-garde féminine du cinéma muet : Lois Weber (inventrice du split-screen dans “Suspense”, en 1913) ; Anita Loos, romancière et scénariste de génie qui écrivit “Les hommes préfèrent les blondes”, adapté par Howard Hawks en 1953 ; Frances Marion, réalisatrice de nombreux polars, oscarisée en 1930 pour “Big House” ; Mary Pickford, cofondatrice de la société de production United Artists, qui milita pour l’égalité salariale dans les studios ; Lillian Gish, vedette de la MGM qui envoyait régulièrement balader D. W Griffiths, avec qui elle tourna “Naissance d’une nation” (1915) et une dizaine d’autres chefs-d’œuvre.

À travers leur trajectoire se dessine une réalité sociale oubliée. Si les femmes se sont emparées des plateaux de tournage, c’est que le cinéma, à ses balbutiements, était considéré comme un art marginal, un terrain de jeu expérimental et inoffensif. En 1927, lorsque “Le Chanteur de Jazz” ouvre l’ère du parlant, le 7e art devient une industrie lucrative – et par la même occasion, une affaire d’hommes. Désormais les femmes n’existeront presque plus que devant la caméra, au service d’un star-system glamour – jusqu’à aujourd’hui, où seuls 20% des films sont dirigés par des réalisatrices. Le combat est plus vif que jamais, semble nous dire, avec une joyeuse insolence, ce docu précieux.

– Léa André-Sarreau, Journaliste, TROISCOULEURS

  • Derrière la caméra
Chez les Kuperberg, le cinéma est une affaire de famille. Initiées au grand écran par leur père (notamment co-producteur du Monsieur Klein de Joseph Losey), ces deux sœurs se font connaître avec une série de documentaires qui dissèquent les revers sombres de l’industrie hollywoodienne, son sexisme envers les actrices (“Rita Hayworth, la création d’un sex-symbol”, 2019), ses marges (“Milos Forman, un outsider à Hollywood”, 2011) et ses monstres (“Hannibal Hopkins & sir Anthony”, 2020). Fun fact : ces business women, qui ont créé en 2005 leur propre société de production (Wichita Films) sont fans du travail de Kenneth Anger et de Ryan Murphy, et préparent actuellement un film sur l'histoire du blackface.