AU BONHEUR DES DAMES

  • France
  • 1930
  • 91 min
  • Tout Public
  • Drame
  • Synopsis
Denise, une jeune provinciale, arrive à Paris pour s'installer chez son oncle Baudu, propriétaire de la poussiéreuse boutique de draperies Au Vieil Elbeuf, face au grand magasin Au Bonheur des Dames, tenu par Octave Mouret.
  • Pour aller plus loin :
S’il n’est pas le plus connu des réalisateurs de son temps, Julien Duvivier est pourtant, à l'instar de Jean Renoir ou de Marcel Carné, un maître incontesté du cinéma hexagonal du XXe siècle. Il réalise plus de 70 films entre les années 1920 et la fin des années 1960, et collabore à sept reprises avec Jean Gabin (La Belle équipeVoici le temps des assassins…).

Cette adaptation du roman d'Émile Zola, transposée dans les Paris des années 1920, est le dernier film muet de DuvivierLe film peut s’appuyer sur le talent de son actrice principale, Dita Parlo, qui devient quelques années plus tard, une figure emblématique du cinéma des années 1930 grâce à ses rôles dans L’Atalante (1934) de Jean Vigo ou La Grande illusion (1937) de Jean Renoir.

Sorti en salles à une époque où le cinéma muet est sur le déclin, ce long-métrage passe sous les radars, et ce malgré une tentative de sonorisation de dernière minute - qui sera perdue quelques années plus tard. Dans la belle restauration initiée par la Cinémathèque française et Lobster Films, l’accompagnement musical égaré à été remplacé par une bande originale signée par le compositeur québécois Gabriel Thibaudeau, l’un des meilleurs accompagnateurs de films muets. 

Pour donner vie à son magasin fictif, Duvivier pose sa caméra dans les imposantes Galeries Lafayette Haussmann du IXe arrondissement. Il utilise des travellings et des plans d’ensemble sur des centaines de figurants, pour faire sentir l’immensité de ce temple du commerce, symbole du progrès et de la modernisation. En opposition à cette effervescence, le cadre est bien plus statique lorsqu’on traverse la rue pour entrer dans la petite enseigne de l’oncle de Denise. Les clients habituels n’ont pas résisté à l’appel de la nouveauté et à la grandeur du Bonheur des dames, délaissant peu à peu le modeste commerce du vieil homme.

Que ce soit dans les cuisines bondées du personnel, dans les rayons surchargés du grand magasin ou sur les bords de l’Oise lorsque les employés se retrouvent un dimanche ensoleillé à l’Isle-Adam, Duvivier capte l’agitation de la foule grâce à sa caméra ultra mobile, des cadres variés et un montage frénétique. Pour retranscrire cette cohue presque animale, le cinéaste n’hésite pas à accélérer l’image, ou à intensifier le rythme de la musique. Dans une séquence magnifique, Duvivier ose même l'expressionnisme par un superbe effet kaléidoscopique appliqué à l’image.
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Hugues Porquier, mk2 Curiosity