Une princesse capricieuse veut de toute urgence épouser un prince. Voilà le point de départ d’un film qui a fait un triomphe en Allemagne en 1919, et qui, aujourd’hui encore, nous surprend par sa folle poésie et sa drôlerie intemporelle.
On apprécie d’autant plus ce film qu’Ernst Lubitsch, au début de sa carrière fulgurante, nous offrait des gags purement visuels, qu’on ne voit plus aujourd'hui. Il invente des situations fantaisistes pour le simple plaisir de faire rire, dans lesquelles on sent déjà la fameuse “Lubitsch touch”. Billy Wilder, autre génie du cinéma, la définit comme “l’utilisation élégante de la super blague”. Seul Lubitsch peut réaliser une “comédie burlesque” - comme annoncée au générique - acclamée pour son élégance.
Lubitsch lui-même considère La Princesse aux huîtres comme son premier film avec un “style défini”, qui marque son “passage de la comédie à la satire”. Car il y a bien, toujours dans un ton léger et plaisant, une profonde critique sociale. Un roi qui ne peut pas se moucher seul, une princesse qui épouse le premier venu tant que c’est un prince, et mille servants tous absolument inutiles. La surenchère dans l’excès devient franchement jubilatoire.
Vite repéré par les Américains qui adorent aussi ses films historiques, Lubitsch part quelques années plus tard s'installer à Hollywood. On y surnomme bientôt sa pétillante actrice Ossi Osswalda - comédienne de renom qui joue la princesse aux huîtres - “la Mary Pickford allemande”, elle-même appelée la “Reine des films”. Lubitsch devient quant à lui “ le D.W. Griffith allemand” - en référence au cinéaste-star de l’époque. Aussi talentueux que libre, Lubitsch délaissera finalement les films en costume pour offrir des comédies d’une finesse incomparable.
_
Agathe Wippler, mk2 Curiosity