RUMBA

  • France
  • 2008
  • 74 min
  • VF
  • Tout Public
  • Comédie
  • Synopsis
Dominique Abel et Fiona Gordon forment avec Bruno Romy un trio inséparable. Ensemble, ils élaborent un univers hors du temps, burlesque et poétique. L’idée de Rumba est d’abord venue en rêve à Fiona Gordon, lorsqu’elle parcourait les routes avec Abel, pour leurs tournées théâtrales. En voiture, elle fit un cauchemar où Abel perdait ses bras et elle ses jambes à la suite d’un accident. Mais plutôt que de s’horrifier, le couple décide de garder cette idée et d’en exploiter le potentiel tragi-comique dans "Rumba".
  • Notre avis
«Y’a d’la rumba dans l’air », chantait Souchon. L’air de rien, le second long métrage de Dominique Abel, Fiona Gordon et Bruno Romy est parti pour nous intoxiquer longtemps : le parfait film de début septembre, avec dépression d’automne au-dessus du jardin d’été. Le premier long du trio, L’Iceberg, posait déjà les tréteaux de leur univers déphasé et sensible, passé au tamis de la belgitude. 
Rumba met en scène un couple d’instituteurs de campagne, fous amoureux et fous de rumba, qui accumulent les récompenses dans les compétitions de danse. Un accident de voiture fait basculer leur existence, sans pour autant les faire renoncer à danser avec la vie, aussi sombre soit-elle.

De, disons, Chaplin à Will Ferrell, le comique burlesque meut des corps contrariés par leur environnement. C’est de l’énergie déployée pour ne pas ployer, ou du moins rester digne face au monde, que naissent gags bien sûr, poésie toujours. Abel, Gordon et Romy ont parfaitement assimilé la leçon, avec un sens certain du bricolage. Ainsi, des transparences pendant les scènes de conduite renvoient aussi bien à Hitchcock qu’à Oui-Oui en voiturette : la réussite de Rumba tient à ce clash entre des territoires différents, enfantins et sombres, des humeurs sucrées ou acides. Où Keaton rencontrerait les Deschiens qui déshabilleraient Wes Anderson.

Souvent muet, toujours mutin, composé de plans et d’idées fixes, le film évoque une succession de petites scènes de théâtre (dont sont issus les auteurs), jouant sur le hors-champ et le statisme, mais respirant, avançant constamment. La distance se fait décalage par l’humour – avec pas grand-chose : une jambe de bois, un pain au chocolat ou une robe se délitant comme un spaghetti dans La Belle et le clochard.

Dans Rumba, se perdre est toujours la garantie de se retrouver avec la fraîcheur des premières fois (de préférence sur la plage - voilà le côté belge, le regard perdu sur la mer du Nord). «J'te suis pas dans cette galère / Ta vie tu peux pas la r'fair e», fredonnait donc Souchon. Rumba détrompe la chanson de la façon la plus exquise qui soit : on suit Abel, Gordon et Romy sans se poser de question.

_

Léo Soesanto, TROISCOULEURS