TOKYO !

  • Japon
  • 2008
  • 107 min
  • VOST
  • Tout Public
  • Drame
  • Comédie
  • Synopsis
Tokyo ! est une fantaisie en trois mouvements, réalisée par trois des plus grands réalisateurs de leur génération : Michel Gondry, Bong Joon-ho et Leos Carax. Ce dernier revient au cinéma avec son complice Denis Lavant, et invente un personnage prénommé Merde, effrayante créature qui viendra hanter son chef-d'œuvre, Holy Motors. Interior design de Michel Gondry : Un jeune couple de Japonais tente non sans mal de s'installer à Tokyo. Merde de Leos Carax : Un être répugnant prénommé Merde sort des égouts et sème la panique dans la ville. Shaking Tokyo de Bong Joon-ho : Un hikikomori (un reclus volontaire) tombe amoureux d'une livreuse de pizza après un tremblement de terre.
  • Notre avis
Seize ans après sa sortie, la contemporanéité de Tokyo! est intacte. Peuplé de monstres que l’on déterre et de fantômes que l’on méprise, ce film collectif démontre la capacité de ses cinéastes à creuser le futur comme une matière tangible : noire, poisseuse, électronique, décharnée... Leos Carax, Michel Gondry et Bong Joon-ho entrent dans Tokyo par les chemins de traverse qui caractérisent leurs obsessions.

Le premier, le plus radical d’entre tous, s’immisce dans la ville en terroriste : son film est un attentat. Denis Lavant y interprète une créature romanesque en costume vert. S’expulsant des égouts à la manière d’un geyser, il emporte tout sur son passage : fleurs, femmes et vies... Lors de la présentation du film à Cannes dans la section Un certain regard, le comédien parlait du tournage comme d’un « bain de jouvence ». C’est sans doute la particularité de l’attentat commis : contre les forces destructrices de la conformité, pour la puissance libertaire de l’art. Merde est le premier des trois films (avec Holy Motors en 2012 et Annette l’an dernier) réalisés par Carax après la naissance de sa fille. Une sorte de trilogie du renouveau, en collaboration avec la directrice de la photo Caroline Champetier, qui l’aide à repenser son rapport aux couleurs se traduisant par un passage au numérique dans Annette.

Moins abrasifs, les segments de Tokyo! par Michel Gondry et Bong Joon-ho explorent l’intériorité des Tokyoïtes. Gondry montre la difficile intégration dans un milieu urbain souvent hostile. 

De son côté, Bong Joon-ho s’attarde sur le phénomène des hikikomori, personnes recluses dans leur habitation pour des périodes indéterminées, parfois des dizaines d’années. Mais, là aussi, les films ne peuvent se résumer aux réalités sociales décrites : il y a le mystère d’un cinéma qui pose des questions sans en connaître les réponses. C’est peut-être ce qui lie les trois cinéastes : confiants dans la matière qui habite leurs films, ils acceptent de ne pas savoir tout ce qu’elle contient de vérités.

Jules Brussel