TRAVAIL AU NOIR

  • Drame
  • Synopsis

Trois maçons polonais et leur contremaître, Novak, viennent à Londres pour travailler au noir. Novak, autoritaire, est le seul à parler anglais. Pendant les travaux, le général Jaruzelski instaure l’« état de guerre » en Pologne et déclare hors la loi Solidarność. Lorsqu'il prend connaissance du coup d'État en Pologne, Novak tait la nouvelle à ses compatriotes.Exilé à Londres, Jerzy Skolimowski filme ici une période délicate de l’histoire de son Pologne natale : les protestations démocratiques menées par le syndicat Solidarność et la loi martiale qui fut décrétée en réponse par le régime. Skolimowski veut répondre à chaud à ces événements dramatiques. Tourné dans l'urgence, en seulement quinze jours et dans la propre maison du réalisateur, Travail au noir est un film incontournable sur le thème de l'exil.

  • Notre avis

Pour dénoncer la situation politique en Pologne en ce début des années 1980, Skolimowski prend de la distance en mettant en scène ce qui se joue dans son pays natal entre les murs d’un appartement londonien. Il s’agit aussi pour le réalisateur de raconter en filigrane l’histoire de son propre exil après la censure de son film “Haut les mains”, jugé anti-stalinien par le pouvoir. On ne s’étonnera donc pas que Skolimowski ait choisi son propre appartement de l’ouest londonien, alors en travaux, pour tourner cette fable sur la tyrannie qui s’exerce aussi bien à l’Est que dans le monde occidental dans lequel il a trouvé refuge. Le mensonge par omission de Novak, qui cache le coup d’Etat en Pologne à ses compatriotes ouvriers qu’il exploite pour rénover cet appartement, en rappellera un autre aux cinéphiles. Celui du machiavélique Marko qui, dans ”Undeground” du franco-serbe Emir Kusturica, fait croire à ses camarades réfugiés dans une cave pour éviter les bombardements allemands que la guerre se poursuit alors que la paix est revenue en 1944.

Plutôt qu’une charge trop frontale, Skolimowski fait le choix de la subtilité et de la nuance, n’hésitant pas à interroger son travail de cinéaste en apparaissant dans le film sous les traits du riche patron polonais qui a envoyé les quatre autres travailler en Angleterre. Les trois ouvriers du film ont d’ailleurs véritablement travaillé à rénover l’appartement du cinéaste.

Tristan Brossat, rédacteur en chef de mk2 Curiosity

  • Derrière la caméra

Jerzy Skolimowski, savant conteur de récits autour de l’innocence perdue, a participé, dans les années 1960, au renouveau du cinéma polonais. Exilé en Angleterre à partir de 1981, le Polonais a signé des chefs-d’oeuvre comme “Le départ” en 1967, “Travail au noir” en 1982, ou, plus récemment, “Eo”, Prix du Jury au Festival de Cannes de 2022.